vendredi 31 janvier 2014

Avec le temps...


The Ghost and Mrs.Muir est un film sur le temps. Le temps qui passe et, comme dit l'autre, ne se rattrape jamais.
Nous sommes au début du 20 e siècle. Après la subite disparition de son mari, et la lecture du testament tout juste achevée, Mrs. Muir annonce aux deux tantes acariâtres du défunt qu'elle les abandonne pour changer de vie. Mrs.Muir est à la recherche d'une vie rêvée et exagérée, bref, d'une vie plus proche d'un grand roman d'aventures que d'un classique de Dickens.
Son  voyage initiatique va débuter dans une demeure en bord de mer que l'on dit hantée par le fantôme de son ancien propriétaire le capitaine Daniel Gregg.
Le génie du réalisateur Joseph L.Mankiewicz c'est d'avoir transformé cette histoire divertissante ( qui  a d'ailleurs été tournée plus tard sous la forme d'une série télévisée, c'est dire si, au départ, elle n'était que divertissante) en une magnifique réflexion poétique sur le temps et l'horloge de notre vie. La jeune femme va se montrer digne d'entrer dans la vie  proposée par le capitaine Gregg. Ensemble, ils vont parcourir les océans, visiter le grand monde et ses  habitants. La critique a vu dans ce film une lutte entre le réel et l'irrationnel, mais on peut y voir aussi une opposition entre la réalité et la  fiction (non, ce n'est pas la même chose!) La fiction, c'est la victoire de l'extraordinaire sur la banalité, du beau sur le laid, de la création sur l'ordre établi; bref, toutes ces choses subtiles qui font que l'on reste vivant.
Et si vous pensez que ma passion pour Gene Tierney m'aveugle, vous avez raison.
Julius Marx






lundi 20 janvier 2014

Des nouvelles du Diable



Si  Touch of Evil (que l'on pourrait traduire par la trace, l'empreinte, ou la main du Diable !) est un grand film Noir, c'est bien parce  que son contenu  s'articule essentiellement autour de la lutte que se livrent le Bien ( un avocat idéaliste) et le Mal (un flic totalement corrompu).
La  séquence de présentation nous fait découvrir la ville, de nuit. C'est une cité qui s'amuse et le chaland peut facilement jouer, boire ou monter dans la petite chambrette d'une jolie dame pas farouche pour un pesos pour y finir sa canette en toute décontraction. On comprend aussi que la majorité des établissements où l'on vient se détendre gentiment appartient à la pègre locale, combattue justement par notre personnage principal (Heston/l'avocat). Comme le privé,  il cherche à rétablir l'ordre du droit en luttant contre la corruption instituée par une grande famille.
Cet homme est dangereux pour le clan et les politiciens à leur solde parce qu'il met en péril la survie de leur société et non pas comme dans une stupide série policière télévisée où le tueur transgresse simplement les règles de l'ordre social.
Il faut donc le remettre dans le droit chemin et ceci, par tous les moyens à  disposition.
Le principal homme de main du clan est un flic en état de décomposition avancée (Welles/Quilan).
Welles qui a toujours fabriqué des personnages hors du commun, des monstres  à ego démesuré se sert donc du vieux Hank Quilan pour symboliser à lui seul, ou presque, ce que cette société peut avoir de sordide et d'ignoble.
La justice et l'arbitraire s'affrontent donc et la caméra est tour à tour disposée dans un camp et dans l'autre. Ce qui explique peut-être cette vision au-dessus , et aussi la magnifique volte-face de l'objectif au coeur de  la fameuse scène où un agresseur lance du vitriol  au visage de l'avocat.
Comment ne pas parler également de l'ultime scène où Quilan agonise au milieu des détritus, tout comme le héros du linceul(1) avant lui.
Le combat est féroce et l'on peut remarquer que si le flic se décompose  au fil des scènes, à tel point que l'on s'attend à le voir expirer à chaque instant, le jeune avocat reçoit tant de coups lui aussi (au propre comme au figuré) qu'il devient amer et aussi sombre que l'image!
Il sait qu'il ne redressera pas le tort général de ce monde,et vous aussi, non ?
Julius Marx




(1) Un Linceul n'a pas de poches (série Noire)

lundi 6 janvier 2014

Bonne année !



Pendant cette nouvelle année, nous aurons parfaitement le droit de comparer le film Drive de Nicolas Winding Refn  et They Live by Night de Nick Ray. Affirmer qu'avec une intrigue construite avec les mêmes valeurs polar, le film  de Refn tourne en rond sur le périf de Los Angeles en refusant ouvertement le conflit pendant  que celui de l'étincelant Ray nous sidère par son étonnante construction, ses acteurs fragiles et sa maîtrise calculée.
Il ne sera pas interdit également de préférer la totale  Kurosawa période noire  aux lamentables séries télévisées avec leurs personnages incohérents de type clowns-killers, leurs stupides dialogues et leurs mises en scènes clipées.
Nous prendrons aussi  le temps de décortiquer plan par plan un classique de Lang ou de Welles comme l'amateur de crustacés  sans nous soucier le moins du monde de la bouffe insipide et congelée servie dans les boutiques outrageusement colorées de la grande distribution.
Au rayon sucreries nous choisirons les actrices  et pas les miss-météo à forte poitrine (même si les gros nichons nous troublent encore.)
Nous refuserons en bloc tous les biopics et autres tristes réalités vendus au rayon promo.
Nous nous battrons pour le développement du commerce équitable et ses  petits producteurs courageux. Nous aimerons pendant que les autres consommeront.
Et puis, lorsque le désespoir nous gagnera, nous visionnerons encore Chico et Harpo arnaquant Groucho avant le grand départ vers l'Ouest.
Bref, on ne changera rien.
Julius Marx