mardi 19 mai 2015

Crise(s)


Veuillez, je vous prie, me pardonner ce long silence dont la responsable n’est pas la grève d’une certaine catégorie de personnel mais une seule femme décidée. La belle obstinée s’étant juré de me faire découvrir les fonds marins, moi qui éprouve déjà tant d’amères difficultés à comprendre ou appréhender les êtres vivant en surface. Et, comme si cet exercice d’immersion totale n’était pas suffisamment avilissant  il faut, en plus, respirer avec un truc en silicone dans la bouche !
Bref, cet article ne causera donc point de petits poissons multicolores mais, encore une fois, de passion et d’émotion ; puisque je règne en despote sur ce blog  inventif, ludique et spectaculaire, refusant catégoriquement la démocratie ou le simple dialogue avec le peuple.
Dans les années trente, Paul Valery écrivait dans ses fameux cahiers : « La passion et l’émotion me répugne : Pourquoi surélever le moment du désordre et de la simplification. Toutes les bêtises de l’homme en crise ? » Cette phrase contient à elle seule une sorte de contre-indication de la création cinématographique. Le travail d’un auteur ne doit pas se borner à filmer platement la triste réalité (car la misère de l’existence est plus que jamais visible, on s’ennuie ferme, même dans la suite présidentielle  d’un luxueux palace de la côte d’Azur) mais il doit être capable de faire surgir l’extraordinaire, l’anormal et l’excessif chez l’homo-sapiens-vulgaris.  
Que m’importe un sujet sur le monde du travail si les ouvriers de l’usine ne séquestrent pas leur patron ou ne tentent pas l’expérience de l’autogestion. Pourquoi  s’acharner à suivre un fonctionnaire de police dans ses rondes nocturnes s’il ne finit pas par commettre une bavure ou bien, alors, s’il ne tombe pas fou amoureux d’une ancienne princesse iranienne devenue travailleuse au bois. Un cinéaste filme le dérèglement. Voyez par exemple Cassavetes  qui n’a cessé de filmer « toutes les bêtises de l’homme en crise. » Revoyez également de quelle façon Ethan Edwards résout ses problèmes personnels. Et puis, zut, profitez-en pour revoir  tous les grands films. En résumé, l’auteur ne filme pas la crise mais ses causes, ou bien encore ses propres crises.
Dans ce blog, nous nous amusons beaucoup. Pendant ce temps, d’autres montent et descendent des escaliers  habillés  d’un costume de location  ou permanentés par le numéro un mondial des cosmétiques.
Bien entendu, si vous n’êtes pas d’accord avec les idées contenues dans ce texte vous pouvez m’écrire. Je détruirai immédiatement vos lettres avant de les lire. Et puis, je ne suis toujours pas en mesure d’entendre vos réprimandes, j’ai encore de l’eau dans les oreilles.
Julius Marx
PS : J’ai passé une journée entière dans le désert jordanien, celui du décor de Lawrence d’Arabie. Depuis  la boutique de souvenirs, au sommet d’une colline, nous avions une vision  quasi parfaite sur les sacs de plastique qui voletaient dans l’air et sur les 4X4 des bédouins, rangés près des tentes.Le cinéma, amis lecteurs, est une boutique de souvenirs.

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