dimanche 7 février 2016

Plus dure sera la chute





Avez-vous remarqué, amis lecteurs, le nombre important de films plaisants, qui, certes, donnent de la distraction, mais ne sèment aucun trouble dans notre esprit ? C’est à peine si nous nous rappelons le nom du personnage principal, quelques heures plus tard, quand vient ce moment délicieux de s’allonger avec un bon roman.
Il me semble que ces films sans contenu ont tous un point commun : ils n’ont pas vraiment de chute. Oui, je sais, vous allez me répondre illico, vous qui lisez ce blog depuis plusieurs années déjà, que la chute est bien souvent le résultat du contenu et je ne peux vous donner entièrement tort, petits futés que vous êtes. Mais, nous devons tout de même prendre en compte ce curieux phénomène de mode dont l’incroyable stupidité consiste à laisser le spectateur achever lui-même l’histoire selon son inspiration. Je sais aussi que certains   esprits retors (j’aime à penser qu’ils sont nombreux à lire ces lignes)  vont me rétorquer en souriant qu’un film sans début et sans milieu ne peux pas, logiquement, avoir de fin ; oui, c’est un fait.
Alors, pourquoi ? Eh bien, je pense simplement que depuis l’abandon pur et simple du scénario, il ne peut pas en être autrement. Les scénaristes blacklistés ont tout bêtement laissé la place à cette fâcheuse politique des auteurs. Inutile de le regretter ni d’évoquer comme tant d’anciens spectateurs (je ne veux choquer aucun de vous, ancien ne veut pas forcément dire vieux, hé ! Ho…) le cinéma d’avant, le vrai cinéma !
J’ai vraiment été très heureux de partager cette petite conversation avec vous. Il est temps maintenant de passer à la partie critique des quelques films que j’ai pu voir ces jours derniers, histoire de se détendre un peu.
Oui, passons très vite sur les amusettes télévisuelles comme Pauline détective dont la seule qualité est de se dérouler presque entièrement en Italie. Oui, c’est vrai, les comédiens sont amusants mais, là-encore, le scénario n’est qu’une idée, rien de plus (1). Passons également sur 10 jours en or même si le travail est un peu plus fignolé et que l’on peut deviner un léger contenu. Sur le thème du pauvre (ici une réfugiée) qui vient bousculer la vie très organisée d’un homme qui a tout, ou presque, et qui, avant cette rencontre n’imaginait même pas vivre dans un monde cruel et profondément injuste, l’auteur ne pose aucune question et c’est bien dommage. Et puis, la fin ne résout rien, bien entendu. Les meilleurs amis du monde est une bonne comédie dont le rythme et les acteurs parviennent à nous faire oublier les nombreux clichés rebattus propres à ce genre de production. Le chanteur Marc Lavoine est épatant dans le rôle du lourdingue de service(2) et Léa Drucker toujours juste et belle, ou inversement.
Alors, que nous reste-t-il ? Les vieux films, bien sûr !  Commençons par le très hollywoodien Pandora (Albert Lewin- 1951). Un film avec une accroche, un développement et une chute, quel archaïsme ! Vous connaissez déjà probablement l’intrigue ; la belle Ava hésite entre l’amour d’un riche héritier pilote de course, un toréro célèbre et le fantôme d’un yachtman hollandais. Elle choisira le fantôme, bien entendu, pour s’assurer l’éternité. Comme je l’ai déjà écrit dans ce blog, ce qu’il y a de bien avec les classiques c’est que les connaissons tous par coeur, ou presque.  Aussi, avons-nous le privilège de laisser vagabonder notre regard pour apprécier, par exemple, le cadre dans lequel évolue Pandora. Nous découvrons tant de fleurs, de livres, de tableaux et autres statues grecques que nous comprenons pourquoi la Dame préférera l’ivresse des océans. Nous comprenons aussi, en voyant évoluer les personnages sans réelle ambition qui l’entourent (je devrai écrire qui l’oppressent) qu’elle n’aura d’unique issue que dans la fuite. Ceci n’est pas une analyse, mais un sentiment. Et puis, Ava Gardner…
Quittons-nous avec du grand spectacle. Si je ne m’abuse, Luci del Varietà (1950) est le premier film de Fellini en tant que réalisateur, même si le Maestro partage au générique la paternité de l’œuvre avec Alberto Lattuada.  Dans cette chronique d’une petite troupe de music-hall, on peut deviner l’influence des Feux de la rampe de Chaplin, par exemple, mais on peut y voir aussi l’ébauche de certains thèmes plus spécifiquement felliniens comme la mélancolie ou le désarroi, en particulier dans la merveilleuse scène d’ouverture (que l’on pourra revoir plus tard à l’identique, ou presque dans Fellini Roma.) Fellini filme les petites gens, le peuple qui s’amuse. Joie, tristesse, dérision, ironie, malheur… Le grand cinéma italien est déjà là.
Oui, vous savez bien, le vieux cinéma.

Julius Marx 

(1)   La fin ? Un plan avec un point d’interrogation !
(2) Nous prouvant du même coup de le métier d'acteur n'est pas si compliqué que ça.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire