jeudi 2 mai 2013

La tête de l'emploi



Dans le cinéma français d'avant ( celui des scénaristes et du noir et blanc, bref, celui des années précédant la pénible révolte bourgeoise des années soixante) lorsque le réalisateur d'un film de cape et d'épée criait à ses assistants : "je veux un nain, là-bas, dans le coin gauche, près de la colonne et des trois ménestrels" les assistants envoyaient d'autres assistants, fissa, au domicile de Piéral , histoire de proposer au comédien un cachet ou deux. Si encore un autre exigeait que l'on remplace sur le champ le type qui jouait le rôle  du fourbe par un autre plus chevronné, c'est à la porte de l'ignoble Guy Delorme qu'ils allaient frapper. Et enfin, si un dernier demandait :" quel est l'imbécile qui a engagé cet aubergiste?", un stagiaire téléphonait à Robert Dalban ou Marcel Pérès en leur demandant de se pointer en quatrième vitesse au studio.
Ces hommes là avaient ce qu'on appelle "la tête de l'emploi" ou" une gueule" et les spectateurs devinaient tous à la seconde précise où ils apparaissaient sur l'écran le rôle et la fonction de ces personnages. Facilité. Dites-vous?  Eh bien oui, précisément. Mais, demandez-vous plutôt ce qui était important pour le réalisateur :  tenter de revaloriser la fonction d' aubergiste ou faire progresser son intrigue ?
Aujourd'hui, dans notre monde marchand où l'intrigue n'est plus qu'une petite flamme,  une flammèche qui dure à peine le temps d'une bande annonce, il semble qu'une grande partie des produits filmés ne se construise plus qu'avec  un ou deux personnages outrageusement caricaturés et pas grand chose d'autre.
Ainsi, lorsqu'il nous prend l'envie d'aller faire un petit tour De l'autre côté du périf  nous ne voyons s'agiter que deux prototypes de flics grotesques (l' un est de la banlieue, l'autre d'un beau quartier),  dans une histoire qui se décompose au fur et à mesure de la progression de leur enquête.
On devine pourtant qu'Omar Sy pourrait jouer autre chose et d'une autre façon et que son partenaire serait fort capable de lui donner la réplique.
Bref, après Omar pousse un fauteuil roulant, voici maintenant Omar devient flic.
Mais, tout ceci est évidemment de notre faute. Aller faire un tour en banlieue, je vous demande un peu !
Je propose  au réalisateur de ce produit sans aucun goût ni sel ajouté une reconversion, par exemple, dans le métier d'aubergiste.
Allez, on ferme.
Jullius Marx
Photo : Marcel Pérès et Louis Jouvet dans La charrette fantôme de Julien Duvivier. Remake d'un film de V.Sjöström dont on parlera un de ces jours. Mais, pour ça, il  ne faudrait pas que je passe mon temps à critiquer des films insignifiants. Quelle misère!




















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