mardi 13 mai 2014

Poète, vos papiers!



Tati est l'archétype de l'artiste. C'est un poète et un créateur qui n'a  cessé de jouer avec le public sans jamais se foutre de lui.
Son Playtime  est un avertissement, un plaidoyer pour un monde qui s'éteint lentement et qui sera remplacé par l'autre monde, celui des néo-libéraux. Un monde lisse et sans révolte où le poète sera traité comme un paria. Tati  dit simplement à ses spectateurs : surtout ne perdez pas votre âme et votre particularité pour entrer dans cette société robotisée. Comme Keaton et Chaplin avant lui, il se sert de la réalité, mais pour mieux la magnifier. Il ne confond pas progrès et développement, marchandises et création. Tati ne cherche pas le réel, il l'évite soigneusement.
Côté réalisation, il invente un mode de récit où la caméra est toujours placée en retrait de l'action comme pour permettre à ses spectateurs d'avoir une vision globale de l'ensemble. Grâce à cette place donnée, le spectateur ne se prive pas de  regarder tout ce qui bouge dans l’écran.  De haut en bas et de droite à gauche. Allez hop !  Ca gesticule dans le cadre !
Tati fait du cinéma-muet / sonore. Il  met au point une vraie bande son qui devient un élément indissociable  du contenu. Chez lui, pas de nappes musicales épaisses comme de la crème à tartiner, mais une musique parfaitement adaptée aux scènes, un son (même s’il est le plus souvent fictif) qui colle à son objet etc.. Un dialogue d’une mélodie rare, composé de borborygmes et  de bruitages vient enfin couronner le travail.
 Croyez-le si vous voulez mais, j'ai vu ce film une bonne quarantaine de fois et pourtant, il m'arrive de découvrir encore un de ces "détails" magnifiques qui me font sourire.
Avec Playtime, Jacques Tati a réinventé le cinéma, juste pour deux heures, deux heures seulement.
Nous rions donc des imbéciles qui le traitèrent de rétrograde.

Julius Marx

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