mercredi 8 février 2012

le journal d'un repenti


Dans l'immense proportion des images filmées la tendance du moment semble être la scène courte, avec une accroche mais le plus souvent sans aucune chute. Deux personnages s'observent, se risquent à échanger quelques mots puis, nous passons à autre chose.. Une autre scène, un autre lieu, deux autres personnages etc..  Le spectateur n'a même pas eut le temps d'avaler le reste de ses pop-corns. Qu'importe, il peut se consoler en pensant que de toutes façons, la musique couvrait la quasi- totalité du dialogue. Dans tout les cas, le metteur en scène évite soigneusement l'affrontement. Le consensus est total, accepté par les honorables membres de la profession qui ont tous juré devant l'ordinateur Hal (ou un de ses potes) de servir et d'honorer la cause. Les dealers se frottent les mains, les chaines de  télévisions financent et promotionnent, les producteurs recrutent et organisent le trafic. En fin de saison, les parrains invitent leurs hommes de main dans un de leurs restaurants et distribuent des statuettes dorées. La tromperie ne serait pas possible sans les carabiniers de l'état qui répartissent eux-mêmes l'argent récolté sous forme de subventions et autres aides.
Le milieu impose la loi du silence. Aucun témoin ne parle, ne s'abolit. Il ne se sent pas complice, il veut simplement manger, et il possède un solide appétit.
Abandonnons ce monde (ce blog nous le permet) et parlons plutôt  de "l'Idiot "de Kurosawa.
Il est frappant de constater que la technique est au service de la scène et du contenu. Ici, pas de découpages nerveux. La scène se joue entièrement. L'affrontement n'est pas évité, il est même le moteur. L'auteur exploite le capital émotionnel de chacun des ses personnages. Du  choix et  de la  valeur  du plan , on peut penser qu'ils sont minimalistes, évidemment ce n'est pas le cas. Si l'auteur choisit très souvent de positionner ses acteurs dans un cadre souvent restreint en jouant avec les faces et les profils (et en osant même le dos) c'est uniquement pour concentrer l'action sur le principal : l'émotion.
Pendant que d'autres découpent bêtement une conversation en champ et contre-champ, lui cherche toujours le procédé qui peut rassembler, unir. Kurosawa parle de la nature humaine, des souffrances et quelquefois des joies. L'acteur joue (car c'est bien de jouer dont il s'agit) aussi bien avec son corps qu'avec son visage. L'expression compte au moins autant que la réplique. Ce théâtre des sentiments bouleverse.
La recherche des lieux particuliers, la géométrie des décors, la précision des détails et la bande son  (qui ponctue sans assassiner le sujet) viennent enfin finir le travail.


A l'issue de chaque scène, une chute (conclusion de l'accroche) nous pousse vers la scène suivante.
Le film entier va crescendo en respectant les paliers nécessaires pour ne pas perdre les spectateurs en route.
Ceci est d'un désuet !
Voyez ou revoyez  L'Idiot, et en même temps tous les autres films du maître japonais.
C'est un ordre !
Sayonara
Julius Marx