Recueillons-nous. Baissons légèrement la tête et laissons doucement nos rêves flotter jusqu'à l'écran. Générique.
Tout ce qui va suivre n'est en aucun cas parole d'universitaire zélé, ni extrait de savants manuels blancs et noirs . Non, tout ceci n'est que mémoire ; instantanés scintillants en vrac, car tout comme la vie, l'oeuvre de Chaplin n'est pas un continuum.
Dans la grandeur de Chaplin , le personnage du vagabond occupe à l'évidence une place prépondérante. Ce personnage crée de manière tout à fait fortuite (Flash / vision : un livre de Mack Sennett . Un passage cocasse où l'homme explique que Chaplin , jusque la coiffé d'un haut de forme , est devenu Charlot, juste avant un de ses tournages, en enfilant simplement un pantalon beaucoup trop grand pour lui, un gilet trop petit et en se coiffant d'un chapeau melon. ) Bien entendu ce personnage de vagabond est un éclair de génie. Mais, plus qu'un attrait vestimentaire, même symbolique, c'est bien la fonction du vagabond qui est importante. Le vagabond va visiter le monde d'en bas . Il a le pouvoir de jouer les médiateurs entre les différentes classes sociales.Il est l'adjuvant (quelquefois même contre son gré) des petits, des sans grade. Il est l'opposant de toutes formes de pouvoir : les flics bien sûr, mais aussi les riches sans scrupules et les bandes de malfrats. Dans la première partie de la vie du vagabond, celle des films muets à une bobine, le personnage ne donne jamais l'impression de prendre en charge le récit et encore moins de véhiculer le moindre message.Il est simplement un ange tombé du ciel , un Deus ex-machina spécialement chargé par le tout puissant de venir dénouer les fils du récit . C'est à mon sens ce qui fait sa force et sa gloire. Il est vierge, sans passé et sans avenir précis, sans d'autre nom que celui du vagabond.
Dans la deuxième époque du personnage, celle des longs métrages plus personnels, il est toujours le vagabond. On le découvre le plus souvent dans un endroit insolite ( Flash / vision : Le vagabond dormant dans les bras d'une statue , scène d'introduction de City lights). Et puis, une fois sa "mission" achevée , il reprend la route ou disparaît. Evidemment, on ne peut nier que Chaplin fût un mime extraordinaire avec une invraisemblable force comique, des mimiques et une gestuelle inimaginable. Je défie quiconque de visionner par exemple (The Circus) sans rire une seule fois. De n'esquisser le moindre sourire en visionnant le combat du Charlot policeman avec la terreur du quartier. Ce serait impensable et pour tout dire, cette expérience serait d'une stupidité rare.
Si le personnage et sa fonction font l'unanimité , le message ou "contenu " du Chaplin-auteur divise. Certains esprits chagrin reprochent au grand homme son côté trop moralisateur, d'autres son penchant évident pour le trop sentimental. Le trop, justement est l'allié de la fiction, du rêve, de la poésie.Il faut savoir filmer les choses en grand : la GRANDE violence, le GRAND amour, le personnage PLUS GRAND que la vie. Chaplin a certainement le pouvoir de se situer au-dessus de nous, de jouer avec les sentiments sans devenir bêtement sentimental, il savait probablement que sans les sentiments , comme l'écrit Jim Harrison : " nous ne serions que des morceaux de barbaques sur le plancher."
Amen .
Musique /
NOIR
Julius Marx
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