dimanche 28 février 2021

Au pays des pangolins

 





Avertissement : Cette présente chronique a exceptionnellement été écrite à deux.

Le Lac aux Oies Sauvages (Fiction-2019) de Diao Yinan est un documentaire très édifiant et fort instructif sur la Chine, ses hommes, ses femmes, leurs vêtements et leurs motocyclettes. Le spectateur attentif pourra y découvrir :

-Des gangs de voleurs de motocyclettes vêtus de tee-shirt rayés luttant avec d’autres gangs de voleurs de motocyclettes vêtus de tee-shirts bariolés.

-Des policiers casqués sur leurs motocyclettes vêtus de tee-shirts de contrefaçon, tentant d’appréhender ces mêmes gangs de voleurs de motocyclettes.

-Des prostituées joliment appelées « baigneuses » coiffées de grands chapeaux blancs.

-De la pluie...Beaucoup de pluie.

-Des travailleurs et des travailleuses vêtus de blouses réglementaires, solidement encadrés par des bandes mafieuses.

-Des « souteneurs » vêtus de pantalons blancs.

-Des clients de prostituées vêtus de chemises aux couleurs criardes.

-Des immeubles pourrissants flottant dans les immondices, à côté desquels ceux du Caire ou de Kinshasa font figure de Palaces.

Et enfin ( pour ma part, le clou du spectacle!) des groupes mixtes aux gestes mécaniques portant des chaussures aux semelles clignotantes, dansant sur le morceau Raspoutine du groupe BoneyM.

Le spectateur pourra aussi découvrir des comédiens réussissant l’exploit de demeurer une heure et cinquante minutes avec la même expression sur le visage.

Côté technique, l’habitant du monde libre pourra conclure de lui-même que le chef opérateur du documentaire était probablement daltonien et que le responsable du montage a été très vraisemblablement arrêté par la police avant de se mettre au travail. Misère. Mais, ne possédant aucune information supplémentaire sur ce triste épisode il ne lui restera que des hypothèses.

Scénariste ou pas, le spectateur constatera que l’intrigue est aussi fine qu’un vermicelle chinois.

Il affirmera également (le spectateur du monde libre) que le réalisateur capable de mettre en scène l’unique scène d’amour du film (1) en l’achevant par la femme qui crache la semence de l’homme dans le fleuve n’est qu’un épais porc.

Non ! Père, tu n’as pas compris. Le réalisateur se sert de la forme-polar (maladroitement, c’est vrai) pour un inventaire époustouflant et si tu n’y vois que de l’abject et du sordide, c’est peut-être que la vie dans ce pays là, aujourd’hui, n’est qu’abjecte et sordide ? Si tu ne décèle aucune expression sur les visages des personnages, a tel point que l’on dirait bien qu’ils sont sans-vie, c’est peut-être parce qu’ils sont si soumis, si vaincus, qu’ils ne tentent même plus de lutter ? Toi qui clames si souvent qu’un réalisateur doit avoir une idée (ou un un contenu, comme tu préfères l’appeler) à partager avec ses spectateurs s’il se dit créateur, eh, bien, réfléchis un peu sur ces questions.

Tu parles d’intrigue, mais qui se soucie aujourd’hui de l’intrigue (aussi peu crédible sois-elle) ? Les copié-collé d’un cinéma du quart-monde ne me choque absolument pas, je veux simplement apprendre, et tenter de comprendre.(2)

Ceci étant dit, si je suis totalement d’accord avec toi sur cette fameuse scène d’amour, il n’en reste pas moins qu’à mon sens, elle ne devait en aucun cas se différencier des autres. Je crois que nous pouvons sans hésiter la qualifier de sordide et abjecte.

Bref, je crois bien que nous trouvons tous les deux ce film révoltant, mais, certainement pas pour les mêmes raisons.

Ps : J’adore le groupe Boney M !


Julius et Laura Marx

(1 ) Scène d’amour, c’est beaucoup dire, mais, enfin…

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